Du scepticisme à la défense : une réflexion personnelle sur les bénéfices de la formation en éducation inclusive, Cameroun
Louis Mbibeh
Louis est professeur de français et d’anglais dans le secondaire, dans la région nord-ouest du Cameroun. Il enseigne depuis plus de six ans. Il partage ici ses expériences d’apprentissage et d’utilisation de techniques d’éducation inclusive. Il met en lumière les défis et le chemin à parcourir pour sensibiliser et encourager ceux qui restent sceptiques sur la mise en œuvre de l’éducation inclusive.
Premier contact
Un atelier sur l’éducation inclusive a été organisé par le Programme SEEPD (Socio Economic Empowerment of Persons with Disabilities – Autorité Socio-économique des Personnes Handicapées) du Centre de Santé de la Convention Baptiste du Cameroun en 2011. J’y ai assisté à contrecœur, ne comprenant pas ce qu’était l’éducation inclusive. J’avais vu des personnes handicapées, mais mon attitude était généralement celle de l’indifférence ou de la pitié; je les évitais.
Cependant, les présentations de Mme Bridget Fobuzie et M. Ezekiel Benuh, respectivement sur ce qu’est l’éducation inclusive et sur le handicap/ l’égalité, m’ont fait penser différemment et je suis devenu déterminé à en savoir plus. J’ai participé à deux cours intensifs organisés par le Programme SEEPD. J’ai trouvé ces ateliers enrichissants, et je suis devenu ambassadeur pour l’éducation inclusive dans un contexte où peu de gens comprennent le concept.
Ma réponse
J’ai réalisé tout ce que j’avais manqué ces dernières années, et qu’un certain nombre d’élèves avaient quitté mes cours en ayant peu ou rien appris. J’en ai fait un défi, et j’ai commencé à faire des recherches sur la pratique de l’éducation inclusive dans le monde, et j’ai envisagé des adaptations possibles pour les classes camerounaises.
Ces deux dernières années, ma pratique de classe s’est fortement améliorée. Je sais désormais que l’éducation inclusive n’est pas uniquement pour les personnes handicapées, mais qu’elle aide à rendre la connaissance et l’apprentissage accessibles à tous. Ma détermination doit donc continuer à avancer, pas seulement d’un point de vue général mais pour se concentrer sur des déficiences spécifiques et les aménagements de classes qui leur sont liés.
Les défis, et comment aller de l’avant
La mise en œuvre de l’éducation inclusive dans un contexte où presque 75% du personnel ignore sa pratique n’a pas été de tout repos.
Certains des défis auxquels j’ai fait face incluent :
- Attitudes : les collègues qui n’ont pas reçu de formation sur l’éducation inclusive ont tendance à manquer d’assurance
- Politique : puisque le Cameroun n’a pas encore adopté l’éducation inclusive en tant que politique, il est souvent difficile de convaincre les administrateurs de la valeur des questions liées à l’inclusion
- Infrastructures : les besoins de première nécessité manquent à tous les élèves, par exemple des rampes, des cours de récréation, du matériel d’enseignement-apprentissage, etc.
- Curriculum : il est tourné vers l’examen, et la réussite de l’enseignement est évaluée sur la capacité à terminer le programme en entier.
Nous n’avons probablement pas besoin de baguette magique pour surmonter ces défis. Les attitudes et la politique ne peuvent pas changer du jour au lendemain. Alors nous essayons tous les jours d’expliquer et de montrer aux collègues les bénéfices de l’éducation inclusive pour tous les élèves. Si les enseignants commencent à enseigner de façon inclusive, la politique suivra surement, et par conséquent les infrastructures et les méthodes de formation des enseignants seront améliorées.
Les formations annuelles du SEEPD Program reçues par les enseignants sont une initiative louable dans la sensibilisation. Nous encourageons le programme et ses partenaires (CBM, USAID, etc.) à continuer. Selon moi, le SEEPD Program est une des meilleures façons de mettre en œuvre l’éducation inclusive au Cameroun.
Je crois que la formation que j’ai reçue porte déjà ses fruits. Nous ne considérons pas les défis comme des obstacles mais comme des occasions de progresser. Non seulement bon nombre de mes collègues ont été convaincus de la valeur de l’éducation inclusive, mais beaucoup d’autres sont impatients d’être formés. Je crois que cela montre que former davantage d’enseignants est la réponse.
Louis Mbibeh, chez SEEPD Program – Centre de Santé de la Convention Baptiste du Cameroun
Nkwen, Bamenda, Région nord-ouest, Cameroun
Email: mbibeh16@yahoo.com